En cette mi-septembre deux événements viennent en tête des nouvelles que l'on s'échange au village : Les feux et les hyènes
D'aucuns estiment que c'est une des plaies de l'Afrique, mais c'est une tradition bien ancrée.
Les raisons sont variées, elles peuvent en fait être bénéfiques pour la végétation comme on va le voir.
Les parcs nationaux, comme celui
proche de Kilosa, appelé parc de Mikumi, brûlent les herbes en début de
saison sèche pour qu'ensuite les touristes puissent voir de loin les
animaux. Cela permet aussi d'empêcher les zones touffues en forêt, que ce
soient des forêts galeries ou des savanes boisées. Les feux sont bien
évidemment contrôlés, chaque aire étant brûlée l'une après l'autre. Cela
permet aux plantes de repousser, les petites touffes d'herbe étant alors
prisées de herbivores.
Selon les études australiennes les
arbres sont tellement habitués au feu qu'ils doivent subir une exposition
aux flammes pour vivre. Dans certains cas même les graines doivent être
exposées à une chaleur intense pour pouvoir germer en début de saison des
pluies.
Les talus sont incendiés pour nettoyer
le chemin, tout comme les champs afin de pouvoir préparer le terrain pour
la prochaine saison. Il s'agit de culture sur brûlis même si à l'origine
la culture sur brûlis consiste en un débroussaillage par le feu puis une
longue jachère après la récolte. La culture sur brûlis est associée à
l'agriculture itinérante, avec défrichage ou débroussaillage d'une
parcelle de forêt.
L'écobuage consiste en l'arrachage des racines avec des mottes de terre (en gaulois gobbo la motte de terre, en poitevin gobuis) puis à les brûler. Les cendres sont alors répandues sur le sol.
Le problème est la dispersion des éléments nutritifs en fumée, pouvant atterrir à plusieurs centaines voire milliers de kilomètres de là. L'autre incidence est la destruction des vers de terre et des champignons mycorhiziens qui aident à la croissance des plantes, en particulier dans la fixation d'azote (source Wikipedia).
La zone étant humide et fertile il y a peu de jachère. Elle est même de plus en plus réduite vu l'accroissement de la population, certaines parcelles étant maintenant cultivées tous les ans. L'abondance de la végétation adventice rend attrayante cette technique de brûlage afin de pouvoir labourer plus facilement. Certains remédient à la disparition de la jachère en utilisant des engrais chimiques.
Les flancs de montagne sont mis à feu
pour la chasse. Non pas pour se poster en amont des flammes et tirer sur
tout ce qui bouge, mais pour nettoyer la zone et ensuite chasser avec les
chiens lorsque les herbes auront légèrement repoussé. Il s'agit des ces
incendies à flanc de colline ou sous le couvert des forêts.
Bouter le feu, un jeu d'enfant
Ponsiani a donc nettoyé une parcelle se trouvant de l'autre côté de la rivière, ce petit cours d'eau appelé Chole. Il s'agissait d'un feu contrôlé sur une petite surface, et la largeur du cours d'eau devait empêcher toute propagation outre rive. Mais l'un des enfants, âgé de six ans, a cru bon de mettre le feu du côté du hameau. Il y avait un petit vent, tournant, qui a permis au feu de se propager rapidement jusqu'aux maisons. Il est monté à flanc de colline et nous avons dû le circonscrire en mouillant le sentier qui permet de monter au sommet, ce sentier étant alors devenu un coupe-feu. Le tuyau a permis d'approcher la source d'eau près du hameau, pour remplir seaux et arrosoirs.
Au fond à gauche, la source du feu, de l'autre côté de la
rivière.
Le
feu est arrivé au bord des maisons et a ravagé la colline
Le feu grimpe sur la colline Luka, en T-shirt jaune, arrose les abords du feu
J'ai demandé si l'enfant allait être frappé :
- Non c'est interdit. On va le frapper avec des mots, seulement. Un enfant qui est frappé n'apprend pas.
Au bord de la route, à King'wenyu.
Un champ cultivé sur brûlis après abattage des arbres en haut de
Jumbebibi, avant le col débouchant sur la vallée de Chole.
La semaine dernière les troupeaux de vaches des Masaï ont été attaqués par les hyènes. Cela se passait du côté de Ndete, le quartier de Chabima proche de la rivière Nudkwi qui borde la réserve de forêt sur la route qui conduit à Kilosa.
Six vaches ont été massacrées, la viande revendue le lendemain au village pour un prix dérisoire. Cela représente Tsh 600 000 soit 200 euros par tête, une belle perte quand même. Personne au village ne semble attristé, les Masaï envahissant les terres du village de façon illégale. La zone est une aire agricole, ils n'ont pas le droit d'y faire paître leurs bêtes.
Jeudi dernier j'ai rencontré deux troupeaux sur la route, au niveau de King'wenyu, soit peu avant le village. Faisant remarquer aux bergers qu'ils n'avaient pas le droit d'être sur ces terres, ils ont argué qu'ils avaient maintenant implanté des campements ici et là, et qu'ils étaient donc chez eux.
Masai à King'wenyu, faisant paître sans vergogne leurs troupeaux
en territoire agricole
Le problème est l'inaction des dirigeants du village, et
une conversation sur les Masaï ne peut se terminer avant de conclure que
les autorités reçoivent des pots-de-vin de la part des pasteurs.
Avant-hier encore une autre vache a été attaquée par une hyène. Ces
prédateurs ne représentent pas de menace pour les hommes tant qu'elles
peuvent trouver des proies de ce genre. Elle suivent en fait les
troupeaux.